Catalogue qui accompagne l’exposition présentée à l’été 2016. Une publication de la MAQ qui réunit une préface de Sophie Gironnay, où le personnage de Philou reprend du service dans « Philou à la pêche blanche », un texte de Bertrand Rougier, « Cabanes : une perspective architecturale », et les 24 œuvres de Claude Guérin présentées en galerie.
Pignons sur glace
Si certaines cabanes de pêche sur glace captivent par leur laideur, le caractère simple de plusieurs autres soulève l’émotion. Elles constituent en quelque sorte – quoique la chose n’ait jamais encore été analysée – une sorte de portrait du caractère de leur propriétaire. La beauté intrinsèque de constructions les plus bancales – faites de résidus, de débris, d’objets de récupération… – et la cabane « pensée », planifiée et construite avec l’intention évidente d’en faire un endroit de vie destiné à la villégiature, toutes fascinent. La naïveté presque invariable de leur allure, le sens absolu du ridicule involontairement déployé, l’humour ou l’ironie de nombreux éléments de décoration, le goût affirmé du confort ou le dédain évident de celui-ci, le sens des couleurs et des formes mises en évidence sur un fond de neige vierge font de ces habitations temporaires des artefacts de la nordicité. Dans leur désert blanc, le refuge saisonnier, la résidence secondaire, le chalet d’hiver, la roulotte stationnée et quelques armoires – nous pensons à l’exiguïté de celles qui sont de si petites cabanes – fument dans leur joyeuse désolation. Objets colorés dans l’uniformité du paysage, l’esthétique démentielle de certaines maisons de pêche réjouit les yeux et laisse rêveur. Nous aimerions entendre les légendes savoureuses qui s’y racontent en attendant le passage des poissons. Si les histoires de pêche et leurs folles exagérations doivent bien y tenir leur place, aidés par les petites doses d’alcool ingurgitées au cours de la journée, tous les récits sont permis… Quoi qu’il en soit, cachette ou lieu de réunion, refuge ou espace de rencontre, endroit de loisir et de fête ou, pourquoi pas, lieu de méditation, les cabanes enveloppent tous les fantasmes derrières leurs rideaux et le confort de leur poêle qui dégage une belle chaleur.
Jean Yves Collette, février 2015
Crédits photos : @claudeguérin pour les cabanes, @murielulmer @margauxorst pour le livre